Suite au compte rendu de l’audition au Sénat de la Fédération Française de la Généalogie, des sociétés Filae et Geneanet et de DNA PASS pour la légalisation des tests de généalogie génétique, voici la première partie de l’argumentaire que j’avais préparé.
- Un test de généalogie génétique n’est pas un test génétique médical
- 67 millions de généalogistes en France
- L’identité génétique française
- Le Droit aux origines
- Légalisons les tests de généalogie génétique en France
100 000 français se font testés chaque année dans ces laboratoires étrangers, ce phénomène s’étant amplifié ces deux dernières années avec l’apparition de MyHeritage, un nouvel acteur international de la généalogie génétique.
100 000 français par an, cela représente au minimum 1,5 millions de français ayant confié leur ADN à l’étranger en dépit de la législation actuelle interdisant lesdits tests et de la très théorique amende de 3 750 € jamais appliquée.
Nombre de français ont effectué ce test sans imaginer qu’il puisse être illégal. Et nombre de français ne comprennent pas pourquoi ce test d’origines généalogiques est illégal.
La loi française interdit deux types de tests, les tests génétiques médicaux, uniquement accessibles par les médecins, et les tests de paternité, uniquement accessibles par l’autorité judiciaire.
Les tests de généalogie génétique existent depuis l’an 2000 et sont autorisés dans toute l’Union européenne, hormis deux pays, la Pologne et la France.
Le législateur français peut s’interroger sur la nécessaire adaptation de l’autorisation de tests génétiques généalogiques accessibles aux citoyens concernant leurs origines.
Mais pour expliquer les différents tests génétiques existants, et leurs différences fondamentales, nous devons comprendre ce qu’est un test génétique.
En voici un court résumé.
Fondamentaux sur l’ADN
L’ADN contient toute l’information génétique, appelée génome, permettant le développement, le fonctionnement et la reproduction des êtres vivants. Wikipédia
Il est constitué de 4 bases, l’Adénine, Thymine, Cytosine, Guamine, symbolisées par leurs initiales A-T-C-G fonctionnant par paire. A s’associe à T formant la base AT et C à G pour la base CG.
Nous disposons de 46 chromosomes, en plus des chromosomes X et Y selon notre sexe, chaque chromosome étant constitué de gènes. Dans chaque gène, la succession de ces 4 bases AT-CG, régit tous les aspects de notre être, des aspects physiques, de risques médicaux ou de protection contre des risques médicaux, des traits comportementaux, du fonctionnement de notre organisme, etc. soit environ 20 000 gènes.
Ce sont les mutations, ou variantes, intervenant dans cet enchaînement de paires de bases, AT – CG, où A pourra se retrouver associer avec G, par exemple, alors qu’il ne le devrait pas qui vont nous identifier de façon unique. Ces variantes, apparaissant tous les 100 ou 1 000 paires de bases, vont se retrouver à l’identique dans des groupes de populations et dans des groupes familiaux, leur identification permettant de nous y relier.
Le nombre de bases codant, s’exprimant toujours par paire, différenciant l’être humain des autres espèces, représente un peu plus de 1 % de notre génome complet, soit 35 millions de paires de bases.
Les laboratoires vont se limiter à l’analyse d’environ 700 000 paires de bases, soit 1,4 millions de lettres, suffisant pour leurs exploitations en termes de généalogie génétique.
Pour une comparaison, un roman compte environ 2 000 signes par page, le déchiffrage de cette petite partie de notre ADN représente 700 pages entièrement noircies de l’enchainement de ces lettres sans espaces séparateurs.
Donc, lorsqu’un laboratoire de généalogie génétique fait l’analyse de notre ADN via un échantillon de salive, il récolte comme informations sur notre ADN ce fichier de 1,4 millions de lettres s’enchaînant appelé fichier de données brutes.
Vous l’avez compris, ce fichier de données brutes, est inexploitable en l’état par n’importe quel être humain.
Tests de généalogie génétique et tests génétiques médicaux
Dans le cadre d’un test de généalogie génétique, l’individu a passé un contrat avec le laboratoire afin que celui-ci interprète ces données brutes par un « traducteur », un programme informatique avec des algorithmes, pour obtenir des données ethniques et familiales exclusivement.
Si le laboratoire veut analyser les données médicales, il devra passer le fichier de données brutes, dans un autre programme, dédié à l’analyse médicale.
Nous ne devrions pas parler de test génétique médical mais d’analyse médicale ou d’analyse généalogique d’un test génétique.
Faisons le parallèle avec mon domaine professionnel. Dans la banque, le client nous confie non seulement son argent, mais des informations confidentielles précieuses sur le montant de ses revenus, son patrimoine, son mode de vie via ses achats, abonnements, etc. Nous avons toutes ces informations personnelles à disposition, pourtant nous ne pourrons pas forcément les utiliser. La réglementation, la déontologie, la législation française nous impose de respecter un cadre contractuel de confidentialité de ces données et de leurs traitements.
Afin de s’assurer que nous les respectons bien, des contrôles peuvent être organisés et des amendes conséquentes appliquées.
Ce n’est pas parce que nous disposons de données personnelles que nous pouvons les utiliser à notre gré.
Ce n’est pas parce qu’un laboratoire de généalogie génétique dispose de ce fichier de données brutes qu’il peut l’utiliser pour des études médicales. Il doit respecter le contrat passé avec son client qui lui a commandé uniquement une analyse généalogique à partir d’un test génétique.
Les contre-vérités sur 23andMe
Et cependant, 23andMe le fait. On l’accuse même de revendre les données ADN à des laboratoires pharmaceutiques. Ces fausses informations portent préjudice au sujet des tests de généalogie génétique.
Rétablissons la vérité sur le sujet.
23andMe vend des test génétiques généalogiques, des tests génétiques médicaux et un pack associant test génétique généalogique et test génétique médical. En 2008, je n’avais pas le choix, je ne disposais que de ce pack de double test. Depuis, 23andMe a changé sa politique commerciale. Ainsi, en France, on ne peut plus acheter d’analyse génétique médicale mais uniquement l’analyse généalogique du test génétique.
Après avoir acheté un test génétique généalogique, ce laboratoire va nous demander dans les paramètres du compte si nous acceptons de participer au programme de recherche médicale en répondant à des questionnaires en ligne et en donnant notre ADN. Cet accord est révocable à tout moment.
80 % des presque 10 millions d’utilisateurs de 23andMe ont accepté de participer à ce programme de recherche médicale.
Les données génétiques sont anonymisées, aucun nom, date d’anniversaire ou autre éléments personnels ne sont associés au fichier de données brutes transmis permettant d’identifier parmi les 10 millions d’utilisateurs celui à qui appartient ledit fichier brut.
Ces données sont utilisées par 23andMe en coopération avec des grandes universités américaines pour faire des recherches et publications scientifiques publiques sur toutes sortes de maladies
23andMe a revendu deux fois pour des centaines de millions de dollars l’accès à ces fichiers de données brutes anonymisés à des laboratoires pharmaceutiques à des fins de recherche médicale.
23andMe ne vend pas les fichiers de données (ainsi qu’écrit à tort dans la presse) mais vend l’ACCÈS durant un temps limité aux informations anonymisées de ces fichiers de données à des fins de recherches médicales.
Le ministère de la Santé français, le 29 novembre dernier, vient d’effectuer une opération quasi similaire avec le Health Data Hub. L’état français donne accès à nos données médicales hautement sensibles d’assurés de la sécurité sociale, nos dossiers médicaux et d’hospitalisations, de façon anonymisées à des acteurs publics de la recherche médicale mais aussi à des start ups privées sélectionnées, afin de développer des services utiles pour nous les assurés et malades. Malheureusement, ce Health Data Hub n’intégre pas encore les données génétiques, domaine sur lequel la France accumule les retards.
La différence consiste en ce que cette démarche d’accès est fournie gratuitement par l’Etat français, alors que 23andMe, société commerciale, en tire un profit, avec l’accord des principaux intéressés, nous, les propriétaires des données, les personnes testées.
Si les tests de généalogie génétique étaient autorisés en France, nul doute que les français seraient prêts à confier gratuitement à la recherche française leurs données génétiques brutes à des fins de recherche médicale.
Un test de généalogie génétique n’est pas un test génétique médical.
- Un test de généalogie génétique n’est pas un test génétique médical
- 67 millions de généalogistes en France
- L’identité génétique française
- Le Droit aux origines
- Légalisons les tests de généalogie génétique en France