Découvert en 1903, le squelette de l’homme de Cheddar âgé d’environ 10 000 ans est le plus ancien squelette d’homo sapiens découvert en Grande Bretagne. La première reconstitution de son visage l’imaginait en causasien. Grâce à l’étude génétique de ses ossements, son véritable visage a été révélé, noir aux yeux bleus. De quoi surprendre ses descendants britanniques !

L’homme de Cheddar, haplogroupe U5

Mort dans la vingtaine, ce chasseur-cueilleur était enterré dans la grotte de Cheddar, dont il tire son nom. Le squelette fut découvert fortuitement lors de travaux dans d’une attraction touristique, le Gough’s Cave dans la gorge de Cheddar dans le Sommerset. Mesurant 1m66, l’homme de Cheddar avait été enterré seul alors que les pratiques funéraires de l’époque consistaient à regrouper dans des fosses communes les dépouilles des défunts. Peut-être son décès inopiné, loin de son groupe, explique-t-elle cette singularité.

Bryan Sykes, l’auteur des 7 filles d’Eve avait prélevé de l’ADN d’une molaire du squelette de l’homme de Cheddar. Grâce à ce prélèvement, il avait pu définir son haplogroupe, encore présent dans 10 % de la population britannique, l’haplogroupe U5, mais n’avait pas pu extraire l’ADN complet. La première reconstitution du visage de cet ancêtre des britanniques avait été réalisée avec la peau blanche.

La première reconstitution du visage de l’homme de Cheddar et Adrian Targett, un de ses lointains descendant toujours vivant à Cheddar

La publication du visage et des recherches généalogiques avaient permis de retrouver un de ses très lointain descendants, toujours vivant à Cheddar, comme tous ses ancêtres avant lui. Adrian Targett, professeur d’histoire géographie, avait été ému de retrouver une certaine ressemblance entre son visage et celui de son très lointain ancêtre génétique, avec lequel il partageait aussi l’haplogroupe U5. Que pense-t-il aujourd’hui de la nouvelle reconstruction faciale de son très lointain ancêtre ?

En février 2018, un nouveau prélèvement effectué dans l’os de l’oreille interne, l’os le plus dense du corps humain, a permis d’extraire le génome complet de ce chasseur-cueilleur. Alfons Kennis, et son frère jumeau Adrie, de Kennis & Kennis Reconstructions, entreprise spécialisée dans la reconstruction paléontologique, ont procédé à la nouvelle représentation du visage de l’homme de Cheddar basée uniquement sur les données physiologiques extraites de l’ADN. Grâce à cet échantillon complet d’ADN, la couleur de la peau, des cheveux et des yeux de l’homme de Cheddar a pu être déterminée. A la grande surprise des chercheurs, le chasseur-cueilleur avait les yeux bleus, la peau noire et les cheveux bouclés.

Carte détaillée du Sommerset, où le squelette de l’homme de Cheddar a été retrouvé en 1903

Initialement originaire d’Afrique sub-saharienne, l’haplogroupe U5 s’est dirigé vers le Moyen-Orient avant de se diriger vers l’ouest de l’Europe et de traverser l’ancien pont de terre nommé Doggerland reliant la Grande-Bretagne avec l’Europe continentale. L’apparition de la peau claire est liée à la carence en vitamine D dans la nouvelle alimentation de ces migrants. La peau s’est éclaircie afin de puiser dans le soleil la vitamine D lui faisant défaut, et indispensable à la fixation du calcium sur les os. Alors que ce changement de couleur de peau était supposé s’être déroulé il y a 40 000 ans, cette découverte bouleverse la chronologie de l’évolution humaine en l’écourtant de 30 000 ans.

Tom Booth, archéologiste au Natural History Museum, ayant travaillé sur le projet a dit : « cela montre vraiment que les catégories raciales imaginaires que nous avons sont vraiment des constructions très modernes, ou très récentes, qui ne sont pas applicables du tout au passé. »

La Grande Bretagne a été périodiquement habitée jusque vers 11 700 ans environ, où l’occupation devint définitive.

 

 

 

Squelette de l’homme de Cheddar, vieux de 10 000 ans, conservé au Natural History Museum à Londres

The First Brit: Secrets of the 10,000 Year Old Man, documentaire de Channel 4 diffusé en février 2018